En 2020 je n’ai pas eu de métal en fusion entre les mains. Le four est resté froid. Pas de chauffe, pas de coulée. Pourtant, ce n’est pas le temps qui aurait manqué. 2020 hibernation. Claustration. Cette année je n’ai pas eu la force, ou la foi, de ranimer le feu. Il ne s’était pas passée une année depuis ma rencontre avec la fonderie, depuis 2008, ou je n’ai eu ne serait-ce qu’une fois couler le métal. 2020, longue nuit, territoire des monstres. La fonderie dort et est hantée par 8 années de monstruosités qui attendaient leur heure tapies dans les recoins, dans les piles de sable, entre les mitrailles de bronze entassées, sous le lit du four…
Nuit féconde. Nigredo.
Ces monstres sont des scories, des projets avortés, des oxydes amalgamés, des coulures de crasses… tout ce que le procédé de fonderie engendre de sous produits, déchets ultimes bien que neutres, destinés à l’enfouissement si ma philosophie n’était plutôt de les garder, disséminés dans l’atelier, n’ayant pas à disposition de filière propice a leur élimination. 8 années d’artefacts ineptes, apparemment stériles, que j’ai minutieusement d’abords regardé, trié, examiné. Et plus je les ai contemplés moins ils ne m’apparaissaient comme des échecs, débris, détritus ni autres erreurs… Chacun est un fragment d’histoire, un témoin de ce qui s’est passé, ce qui a été produit produit, dans la fonderie.
Mes monstres sont beaux et je veux les montrer
Une a une j’ai repris ces parcelles, je les ai taillées, ciselées, poncées, polies, patinées. Enfin épinglées sur une late de hêtre elles sont prêtes a être exposées dans le bestiaire du fondeur.